dimanche 6 mars 2016

Dépakine : le combat d'une mère pour faire éclater la vérité

Durant de longues années, Laurence a cherché à comprendre pourquoi ses trois enfants sont atteints de diverses pathologies. L'an dernier, elle apprend enfin que la cause en est la dépakine, un traitement qu'elle utilise contre l'épilepsie. Depuis, elle se bat contre Sanofi, qui commercialise ce médicament en France depuis près de 50 ans.
Avant Laurence se battait contre des fantômes, un combat dans lequel "on s'épuise", dit-elle. Désormais, depuis qu'elle sait enfin qui est responsable des difficultés de santé de ses enfants, elle affronte "un mur" appelé Sanofi. Cette mère de famille, qui a accepté de confier son histoire à Thierry Demaizière pour Sept à Huit, a une fille et deux fils.
Lisa est née au début des années 90. A l'école primaire, on lui diagnostique des troubles de la concentration. Elle apprendra plus tard qu'elle a un trou de la colonne vertébrale. Son frère cadet, Lucas, a quant à lui un visage bizarre à la naissance. Atteint de troubles autistiques, il est aujourd'hui handicapé à plus de 80%. Le petit dernier, Loïc, est quant à lui tombé malade rapidement après sa naissance en raison d'une atrophie cutanée au niveau du dos et une hyperlaxité ostéo articulaire.
Durant des années, Laurence (à qui l'on prescrit de la dépakine) et son mari vont tenter de comprendre pourquoi leurs enfants ont une santé si défaillante. Mais les médecins restent sans réponses. En tout cas, d'un point de vue médical. Si Lisa, Lucas et Loïc sont atteints de pathologies si différentes, c'est parce que Laurence et son mari sont "de mauvais parents", conclut un médecin.
Quand les problèmes digestifs de Lisa débutent, un autre thérapeute accuse cette mère d'en être responsable. "Les femmes contemporaines travaillent donc elles stressent et nourrissent mal leurs enfants", lui a-t-on dit. Et puis finalement, l'an dernier, c'est un généticien qui a révélé à cette famille la cause réelle de tous ces problèmes de santé. Le responsable, c'est la dépakine, commercialisée en France par Sanofi depuis 1967 pour traiter l'épilepsie.
"Toute ma vie sera un combat"
Selon l'Igas, ce médicament a provoqué au moins 450 malformations congénitales chez des bébés exposés in utero en France. Mais d'après Laurence, le nombre d'enfants touchés serait beaucoup plus important. Elle évoque jusqu'à 30.000 victimes potentielles. Aujourd'hui naturellement, elle en veut au corps médical. "On se retrouve à aller voir les médecins pour leur demander de l'aide et au bout du compte, on retrouve à être jugé à chaque rendez-vous et être vus comme de mauvais parents".
Après tant d'années passées dans le noir, Laurence redoute à présent que ses petits-enfants soient également malades. "Dans notre association, on a déjà quelques familles, malheureusement, qui sont touchées, où la troisième génération est parfois atteinte d'autisme ou de malformations", explique-t-elle. Des études, encore en cours, devraient permettre de confirmer s'il existe ou non un risque pour les générations suivantes. "On a démarré notre combat il y a 20 ans, j'ai pleuré tous les jours et je me dis en fait que toute ma vie sera un combat. Peut être qu‘on risque d'avoir des petits enfants handicapés, ça c'est mon cauchemar, j'y pense tous les jours".
Pour rester debout, Laurence refuse de pousser la porte d'un thérapeute. Ce qui l'aide au quotidien, c'est son combat contre Sanofi. "C'est le fabricant de ce produit et il doit en assumer les conséquences", assure-t-elle. Et ce combat, elle se dit persuadée de le gagner car contrairement à un fantôme, "un mur, on peut le voir. Et je le démolirai !".
 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire